le light-novel est une rencontre entre le manga et le roman, avec des textes plutôt légers et des illustrations. Ce format cartonne au Japon et a vu naître de nombreux hits comme Sword Art Online ou Re:ZERO, mais il reste méconnu en France. Mahô, une nouvelle maison d’édition entend bien changer cela, avec son premier light novel : Les enfants de Gorre. Écrit par Sylvain Ferrieu et illustré par le coréen Navigavi, ce livre marque les débuts d’un nouvel acteur prometteur sur la scène francophone. Les enfants de Gorre est disponible en librairie depuis le 26 juin 2020.
L’histoire se concentre sur Wilfrid, fils de Folkhart Fenrys, une véritable légende « vivante » et ses demi-frères, Fanegan et Gunnolf. Empreint de valeurs chevaleresques fortes, Wilfrid revient sur sa terre natale dans l’espoir de prendre la suite de son père mourant. Ce dernier aurait inexplicablement vu son âme se faire aspirer lors d’un combat. Cependant, la noble quête de notre héros ne semble pas satisfaire tout le monde : c’est au mérite que tout devra se jouer et ce face aux yeux des plus grands personnages du Royaume. Bien que chacun des frères ait des aspirations différentes, la légende de la Maison Fenrys les unit, avec pour emblème ses trois loups et une arme redoutable. Leurs destins semblent liés par quelque chose qui les surpasse, mais quoi ?
Mahô a frappé fort pour tous les férus de fantasy, de mythes et de mangas : un light novel narrant les aventures de trois frères vivant la célèbre légende du Roi Arthur. Un condensé de références historiques et géographiques qui permet aux lecteurs les plus renseignés de vivre une lecture captivante, réfléchie et légère. C’est ainsi que l’on peut rencontrer Merlin ou alors Uther Pendragon, comme des easter-egg qui donnent à ce roman un cadre semi-historique intéressant. Pour les moins connaisseurs du genre, l’aventure demeure prenante : tout le monde veut connaître la légende du clan Fenrys et les raisons de leurs différences.
Les amateurs de manga les moins habitué au format roman trouveront facilement leurs marques. En effet, un chapitre vient rappeler un schéma scénaristique que l’on retrouve dans nombres de grands shonen (Dragon Ball en tête) : le tournoi. On suit une compétition aux nombreux participants, se déroulant sous les yeux des plus influents du Royaume. Cette espèce de Battle Royale est l’occasion d’introduire de nouveaux antagonistes et des dénouements surprenants pour le reste de l’aventure. La narration du light novel est aussi intéressante : le narrateur invite le lecteur à se poser de nombreuses questions et n’hésite pas à conclure ses paragraphes par des questions ouvertes. Ce procédé permet de guider le lecteur tout en l’impliquant dans l’histoire à un nouveau niveau.
S’agissant des personnages principaux. Ces derniers sont au nombre de 3 : Wilfrid l’aîné et ses deux demi-frères, Gunnolf et Fanegan qui sont jumeaux. Chacun a un tempérament différent et par conséquent, il est très facile pour le lecteur d’avoir un préféré : Wilfrid est un héros de shonen assez classique dont la loyauté envers les règles des chevaliers est remarquable et pour qui l’honneur signifie beaucoup. Gunnolf est plus impulsif, a du mal à réfléchir avec raison, puisque ce dernier n’écoute que son cœur et ses instincts et se met seul en rivalité avec son aîné Fanegan. Ce dernier a un don bien particulier et est d’une intelligence époustouflante. Cependant, son incapacité à s’intégrer aux autres lui rend parfois la tâche difficile. En bref : chaque lecteur trouvera son héros légendaire à adorer. À titre personnel, les questions entourant le personnage de Fanegan et sa mystérieuse capacité à parler aux créatures de la forêt rendent encore plus passionnante son épopée et en font mon petit favori.
De plus, chacun de personnages se voit accorder la même attention : chaque chapitre est divisé en trois partie, allant de Wilfrid jusqu’à Fanegan, narré avec un point de vue très omniscient. Cette attention est subtile et fortement appréciée, mais il serait encore mieux d’avoir quelques passages avec un point de vue interne pour encore plus voyager avec notre personnage préféré, notamment pour les jumeaux qui ont tout deux une sensibilité fortement exploitable.
Les personnages secondaires sont tout aussi intéressants. Par exemple, l’apparition d’un personnage étrange dans la forêt vient rappeler le chat du Cheshire, du fameux livre Alice au Pays des Merveilles. Comme le chat, il guide notre héros avec une pointe de sarcasme et de malice. Pour les plus romantiques d’entre nous, chacun des frères s’aventurera sur les chemins de l’amour, une aventure bien compliquées pour certains. Ainsi, les personnages de Lyra et de Dana seront mis à l’honneur, chacune avec leur propre personnalité. Lyra est particulièrement bien écrite, du fait de son talent, similaire à celui de son cher et tendre.
Un light novel, c’est certes du texte, mais aussi des dessins ! Les illustrations sont très belles et remplissent bien leur rôle de passerelle entre le roman et le manga : Avec cette histoire très historique, très chevaleresque, on peut facilement imaginer aux personnages des visages austères et mûrs, mais les illustrations apportent beaucoup de douceur a ces hommes tourmentés, ce qui les rends on ne peut plus attachants. Bien que celles-ci soient en noir et blanc, il n’empêche que le travail sur les jeux de lumière apporte beaucoup de dynamisme à ces scènes mises en avant. On aimerait en avoir d’avantage dans les prochains tomes !
En bref, le premier tome des Enfants de Gorre annonce une épopée prometteuse et pleine de potentiel : la passion des auteurs est palpable et apporte de la lumière sur un genre passionnant. Bien que des améliorations soient envisageables, il n’empêche que ce light-novel francophone est une réussite pour une maison d’édition en pleine genèse. Chacun peut y trouver son compte, du lecteur de romans médiévaux avec l’univers et ses intrigues, au fan de shonen qui aimera sans aucun doutes ces personnages déterminés. C’est un réel plaisir que de voir ce format s’épanouir en France et on espère une suite de la part de Mahô !