You’ve gotta love song est un josei de la talentueuse Akane Torikai : ce recueil, publié dans Be Love en 2015, est paru le 8 octobre dernier en France aux éditions Akata.
Une mère au foyer désabusée, une lycéenne en fugue, une femme qui retrouve son amant, un couple dont l’amour ne s’étiole pas malgré le temps qui passe… Dans ce recueil d’histoires courtes, Akane Torikai, figure montante du manga, démontre toute l’étendue et la variété de son talent. A travers les portraits de ses personnages désappointés par le monde, elle scrute sans détour les rapports humains, tout en nous questionnant sur l’amour, le sens de la vie et sa vacuité…
Les one-shot de Akane Torikai sont une dose de fraîcheur et d’originalité qui savent se distinguer de toutes les œuvres parues en cette rentrée. You’ve gotta love song présente quatre récits chacun plus doux et surprenant que le précédent : une véritable anthologie poétique qui ne passera pas inaperçue, et pas seulement à cause de sa couverture ! Les histoires sont, dans l’ordre, les suivantes : « Et si j’essayais de vivre ? » « La fugueuse », « Le Parc des cygnes » et enfin, « You’ve gotta love song ».
Chaque histoire nous dresse le portrait de « couples » aux visions de l’amour, du bonheur et de la vie très différentes. Du contentement à l’obsession, tout en passant par l’innocence du premier amour puis le deuil de ce dernier, Akane Torikai nous fait voyager et réfléchir avec une aisance et une sensibilité affolante. L’ordre dans lequel les histoires sont présentées est aussi extrêmement bien choisi et rend la lecture encore plus croustillante : on ne peut s’empêcher de se demander jusqu’où les portraits d’Akane iront.
L’ensemble de ces petites histoires a su nous surprendre en très peu de temps : chacune des chutes est inattendue et a su refléter avec brio la réponse inhérente aux questionnements de nos quatre personnages. En effet, chacun des personnages s’interroge à différents égards sur son existence et ils ne s’empêcheront de désirer, de s’interroger mais surtout de croire en une seconde chance. Par exemple, la deuxième histoire, dénommée « La fugueuse », a une fin extrêmement surprenante, notamment en ce que le titre de celle-ci est en réalité un piège : Mikami, qui était déterminée à partir de chez elle, croise Oshikawa qui lui propose de fuir avec lui, mais conscient des dangers d’une telle décision et soucieux de la jeune fille, il la fera revenir sur sa décision par un geste inespéré et sous la neige tombant, Mikami rentrera au final chez elle. La brève interaction entre ces deux protagonistes réussit à nous convaincre : en un regard et une conversation naturelle, à cœurs déployés, Oshikawa est parvenu à changer la vie de Mikami. C’est un beau message que nous transmet ici Akane, et ce n’est pas le seul. En ce sens, la dernière histoire nous aura tant choqué que touché, et pour les plus sensibles d’entre nous, jusqu’aux larmes.
Pour couronner ces scénarios bien conçus, le trait d’Akane est extrêmement plaisant et émouvant : les visages sont tous très simples, permettant une identification forte avec les personnages dessinés, mais emplis d’expressions et de vie. Le découpage des cases est aussi extrêmement intéressant, alternant entre représentation des personnages et décors d’abord nocturnes puis de plus en plus clair, jusqu’au crépuscule.
De plus, l’auteure n’a pas hésité à appuyer sur les chutes surprenantes de chaque histoire par le dessin : on a donc droit à des plans majestueux et des doubles pages extrêmement poignantes qui donnent aux deux dernières histoires une résonance encore plus forte.
You’ve gotta love song est un excellent Josei qui saura satisfaire tous les lecteurs en quête d’émotions, de poésie et de mystère. De plus, c’est un des rares si ce n’est le seul manga de cette rentrée qui contient des one shot : que de bonnes raisons pour le lire ! Ici, on a hâte de voir les prochaines œuvres de Akane Torikai qui sauront, à coup sûr, retenir notre attention. L’œuvre est disponible depuis le 8 octobre chez Akata.