Shibuya Hell est un manga de Hiroumi Aoi dont les deux premiers tomes sont parus chez nous le 3 juin 2020 chez Pika Éditions. Il s’agit d’un survival-horror pour le moins atypique. Il a d’ailleurs été encensé par Hiroya Oku, l’auteur de Gigant, Last Hero Inuyashiki ou encore Gantz. Ça donne le ton.
Shibuya, quartier ultra branché de Tokyo. 14h50.
J’ai toujours espéré qu’un événement bousculerait un jour mon quotidien de lycéen un peu morne. Le genre de rebondissement que le cinéaste amateur que je suis peut voir dans ses films préférés… mais pas ce genre-là. J’ai vu des passants se faire dévorer par ces… poissons géants, qui sont apparus tout à coup, flottant partout dans le quartier… Ces créatures sont réelles. Ce ne sont ni des effets spéciaux ni des trucages. Et elles ont faim de chair humaine. Moi et d’autres survivants tentons de leur échapper, mais tout porte à croire que nous sommes bel et bien coincés dans cet enfer…
Atypique donc ? C’est le moins qu’on puisse dire. Dans Shibuya Hell, les humains devront survivre à une attaque de poissons rouges géants volants dans le quartier de Shibuya au Japon. Une sorte de dôme recouvre la totalité du quartier, empêchant les gens de sortir et permettant aux poissons se déplacer dans les airs comme dans de l’eau. On suit Hajime Tsukiyoda, jeune garçon rêvant de devenir réalisateur de films, qui se retrouve embarqué dans cet enfer malgré lui.
Dès lors, on ne peut nier différentes inspirations que l’auteur a pu avoir pour réaliser son oeuvre, on peut penser bien sûr à des œuvres post-apocalyptiques comme The Walking Dead pour le côté « groupe de survivants » ou encore Under the Dome pour le côté enfermé dans un lieu sans pouvoir en sortir. Les amateurs de nanar verront aussi une inspiration de Sharknado film dans lequel des requins volants attaquent Los Angeles et où l’on suit des humains qui essaient de survivre. Comme dernière inspiration nous pourrons encore citer Gyo, manga du célèbre maître de l’horreur Junji Ito où les héros se font aussi attaquer par des créatures venues des fonds marins. Une multitude de références qui font que Shibuya Hell existe aujourd’hui, tout en possédant quand même sa propre identité.
En effet, l’oeuvre a un énorme côté grotesque. Le danger vient des poissons rouges, animal inoffensif en temps normal, un contraste qui crée un sentiment de malaise chez le lecteur. Car oui, le premier mot qui vient en tête après la lecture des deux premiers tomes est « malaise ». Et c’est totalement l’effet voulu par l’auteur ! Il n’hésite pas à détailler particulièrement le dessin des poissons rouges pour leur donner cet aspect réaliste jusqu’à en faire parler certains. Le dessin est d’ailleurs plutôt soigné, très graphique avec beaucoup de sang, pour ne pas dire gore. Une vision de l’enfer dans laquelle nos héros vont devoir survivre.
Le premier tome se concentre donc sur Hajime qui fait face à cette attaque avec un groupe d’inconnu, auquel il s’attache au fil de l’aventure. Il rencontre notamment la jeune Arisa, une idole de seconde zone du même age que lui. Ils vont tout donner pour survivre. La fin du premier tome nous laisse sur un cliffhanger (que je ne vous raconterai pas ici) qui n’est pas résolu au début du second. En effet, le deuxième volume nous fait découvrir d’autres personnages, en parallèle de ce qu’il se passe dans le précédent. On suit particulièrement le « Furet de Shibuya« , un SDF du quartier au caractère bien trempé. Celui-ci est très typé manga et moins encré dans le réel. Le Furet parait surpuissant, c’est d’ailleurs le seul qui combat réellement la menace des poissons rouges. Un schéma narratif qui risque de devenir intéressant par la suite s’il se poursuit.
L’horreur passe par le malaise, le malaise par l’absurde. Absurde, l’intrigue de départ l’est, presque excessivement. Pourtant, c’est cette absurdité qui fait la force de l’oeuvre et qui sert aussi un propos sur la dureté de la réalité et la nature profonde de l’homme. Les deux premiers tomes de Shibuya Hell sont d’ores et déjà disponibles dans vos librairies et le troisième est prévu pour le 19 août 2020 aux éditions Pika.