Analog Drop est un shojo entre comédie romantique et voyage dans le temps. Écrit et dessiné par Natsumi Aida, l’auteure de Switch Girl, publié dans le Margaret de 2017 à 2018. En France, ce sont les éditions Akata qui s’occupent de ce titre en seulement deux volumes !
Aku n’est pas une fille bien : très populaire sur Instagram, elle ment comme elle respire. Hypocrite et profitant de son succès, elle sort simultanément avec trois hommes différents pour exploiter chacun d’eux. Mais un jour, après avoir été poignardée dans une rue, elle tombe et se réveille dans les années quatre-vingt ! Désormais investie d’une mission étrange qu’elle doit accomplir avant que la batterie de son portable ne se vide, elle va devoir apprendre ce qu’est l’altruisme !
Analog Drop nous amène donc à la rencontre d’Aku, une jeune fille superficielle et manipulatrice, pleinement ancrée dans notre époque. Brutalement renvoyée en 1983, elle va devoir réussir à mettre en couple Kojirô, un jeune voyou sans le sous, si elle veut survivre et rentrer chez elle. Un postulat assez classique mais efficace, qui est très rapidement rejoint par de nombreux gags, jouant majoritairement sur la différence d’époque de nos deux personnages principaux. Toutefois, on note aussi l’installation d’un triangle amoureux particulièrement ingénieux. En effet, alors que notre héroïne doit faire fructifier l’amour de Kojirô pour sa douce, elle tombe doucement mais surement sous le charme de ce garçon bien loin de ses standards habituels. Cet amour est doublement impossible, car elle n’a pour l’instant que deux options : le mettre en couple et retourner en 2017, ou mourir.
Aku est assez intéressante, car parfaitement insupportable, pour ne pas dire détestable. Pourtant, on réussit à s’y attacher au fil du tome, on la sent évoluer, sans que cela aille trop vite. Elle a de petites épiphanies, avant de revenir à sa mentalité initiale. Un changement doux et naturel qu’on apprécie. Pour ce qui est de Kojirô, il est immédiatement plaisant, que ce soit par son côté furyo ou sa gentillesse cachée. On a qu’une seule envie, c’est de le voir s’en sortir, que ce soit pour ses soucis d’argent ou avec l’élue de son cœur. Les personnages secondaires sont eux aussi réussis, notamment le très drôle trio de racailles qui participe à l’ambiance furyo du titre.
Visuellement et dans l’ambiance du manga, on ressent parfaitement l’atmosphère rétro des années 80. On aurait presque l’impression de lire un manga de l’époque, notamment grâce au superbe travail réalisé sur les décors urbains. Assez peu nombreux, ces derniers ne sont d’ailleurs pas tramés, mais coloriés au feutre, comme le confie l’auteure. Une idée du meilleur effet ! Cette rencontre entre un personnage ultra-moderne et un univers old-school est une réussite totale. Côté chara-design, c’est là aussi convaincant. Aku est à la fois mignonne et physiquement énervante, tandis que Kojirô dégage ce côté « à l’ancienne », tout en répondant aux codes du beau-gosse avec sa nouvelle coiffure.
Si le trait un peu forcé des personnages est un élément comique et narratif intéressant, on regrettera tout de même qu’il s’applique à la critique sociétale. On tombe un peu dans la caricature, les maux sont exagérés. Comprenez par là que notre héroïne est si loin dans sa vision du monde, basée sur la manipulation et la reconnaissance, qu’elle rend le tout peu crédible, alors que le propos aurait pu être mieux géré. Malgré tout, le message reste très actuel et pertinent, en plus d’être (tristement) universel. Le passage où Aku contacte ses followers et petits-amis dans le futur, pour ne recevoir aucune réponse est d’ailleurs particulièrement bien trouvé.
En conclusion, Analog Drop nous propose un très bon premier tome, qui se conclut sur une plongée encore plus forte dans un côté furyo assez inattendu au premier abord. On aurait toutefois aimé un peu plus de finesse dans le message, qui n’en reste pas moins accessible et pertinent. On attend le second et dernier volume avec impatience, qui sortira le 27 mai, toujours chez Akata !